Les musiciens de l’orchestre Staff Benda Bilili, pour la plupart handicapés, ont été, le 14 mai dernier, expulsés de leur « studio de répétition » installé sous les arbres du site des chevaux du jardin Zoologique de Kinshasa, sur instruction de l’autorité de Police de la ville. Cette nouvelle a été annoncée à la presse par Kitambala Malula, du syndicat des travailleurs handicapés (CICPH) alors qu’il réalisait un reportage sur le parcours de cette formation musicale atypique.
Cette expulsion résulte de l’afflux de « fanatiques » et de curieux, y compris de passants, dont la présence dérangeait les touristes venant visiter les animaux. Privés de leur lieu de répétition, les musiciens ont demandé à l’autorité urbaine de leur trouver un autre espace pour exercer leur profession. Ils ont également lancé un appel à l’autorité et aux hommes de bonne volonté pour leur venir en aide afin de se procurer de nouveaux instruments de musique, précisant que l’une de leurs deux guitares avait été offerte par un politicien congolais, Papa Jean.
Selon les témoignages des fans Nzau et Paulin, le Staff Benda Bilili a été créé en 1998. Cette dénomination signifiant « imagination » en langue lingala a porté ses fruits dans un orchestre qui a fait ses débuts avec des artistes comme Ya Coco (guitariste et bassiste), le soliste-guitariste Nzale (fondateur et Président) et d’autres coéquipiers comme Ricky, Théo, Prophèta ainsi que Malu. Après la mort de ces deux derniers artistes, l’orchestre a été renforcé par des nouveaux venus notamment M. Randy, Kapaya, Rigo Marley et Mura (guitariste bassiste et chanteur). En 2009, l’orchestre a bénéficié d’une importante promotion assurée par un producteur français, et Staff Benda Bilili connaîtra ainsi deux formations : l’originale est restée à Kinshasa avec son « vrai » président, Nzale, qui a recruté des nouveaux artistes en repartant de zéro, et l’autre en Europe avec tous les autres.
Parlant de ses réalisations, l’orchestre Staff Benda Bilili aile de Kinshasa a déjà lancé sur le marché plusieurs chansons, dont une est devenue un tube, pour la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) destinée à sensibiliser la population aux prochaines élections [Le Staff Benda Bilili s’était déjà plaint en 2007 d’un « pillage » effectué par la Mission des Nations-Unies au Congo NDLR]. L’orchestre n’a jamais bénéficié de ses droits depuis la sortie de cette chanson, affirment les musiciens. Staff Benda Bilili est une preuve de réussite de personnes handicapées qui sont parties de rien pour se faire un nom. Comme qui dirait, il n’est jamais trop tard tant qu’on n’est pas encore mort ; il faut se battre !
Innocent Zengba, CICPH, mai 2011.
Post scriptum du 23 mai 2011 : La direction n’a pas frappé d’interdiction le Staff Benda Bilili, il s’agissait d’une mesure contre des personnes qui ont transformé le Jardin Zoologique en un endroit propice pour fumer du chanvre, entraînant des comportements inciviques, et cela ne se faisait pas seulement pendant les répétitions de cet orchestre. Les collaborateurs du directeur ont généralisé la mesure jusqu’à l’appliquer à l’orchestre, en prétextant que l’ordre serait venu des autorités du Jardin. A la suite des éclaircissements fournis aux autorités par Monsieur Nzale, l’expulsion ne s’applique plus au Staff Benda Bilili qui a repris normalement ses activités.