La version française de « Ranking of kings » vient d’arriver en force dans les librairies : 50.000 exemplaires imprimés, l’éditeur Ki-oon croit dans le succès des péripéties qui jalonnent l’accès au trône de Bosse du prince Bojji. Né Sourd et non oralisé, il est l’héritier du Royaume conquis par un père monumental, une véritable « armoire à glace » dans un monde de guerriers virils qui doivent s’engager à fond dans les combats pour en sortir blessés et sanguinolents. Sans cela, point de reconnaissance des aristocrates, seigneurs, soldats et population, et d’accès au classement des Rois.
Et comme Bojji a développé des compensations à sa surdité et à sa faiblesse physique, il est écarté du trône qui lui revenait pourtant de droit à la mort de son père ; paradoxalement, Bojji excelle dans l’esquive tout en touchant son adversaire pour le dominer à l’usure, efficace mais pas chevaleresque. Comment ce prince doux et attachant, toujours souriant et prenant sur lui ses douleurs, ses failles, pour mieux les assumer, les vaincre et les évacuer, s’en sortira-t-il ? Deviendra-t-il le meilleur des Rois ? On le saura dans quelques années, au terme d’une série dont le 13e tome vient d’être publié au Japon.
Cofondateur et directeur éditorial de Ki-oon, Ahmed Agne exprime ce qui a guidé son choix de réaliser la version française de Ranking of Kings.
Question : Qu’est-ce qui vous a donné envie de publier une version française de ce manga ?
Ahmed Agne : J’ai adoré ce titre, il est différent et mélange avec brio la fable, le conte pour enfant et le shônen initiatique. Une aventure universelle qui rassemble un public très large. La singularité du héros et le décalage entre la forme et le fond – un dessin naïf versus un scénario complexe et sombre – en font une oeuvre riche, d’une incroyable fraîcheur.
Question : Les handicaps apparaissent plus fréquemment dans le genre manga que dans les bandes dessinées occidentales, comment l’interprétez-vous ?
Ahmed Agne : Le manga a toujours été ancré dans son temps et dans les thématiques sociales. Il s’appuie sur tout pour faire des histoires, ce n’est donc pas aberrant qu’on y parle de handicap. La force des Japonais, c’est qu’ils arrivent à intégrer ces problématiques dans des titres mainstream, à destination des jeunes et des jeunes adultes, un segment que la BD a un peu déserté. Dans la BD il existe le segment jeunesse et le segment adulte, et au milieu c’est le grand vide. Il en découle que certaines problématiques adolescentes sont moins traitées mais surtout plus visibles dans le manga.
De plus, la BD propose souvent cette thématique sous la forme d’un témoignage de vie, là où le manga l’intègre dans le récit : le handicap n’est pas un sujet, n’est pas l’histoire en elle-même mais fait partie intégrante de l’oeuvre. Dans Ranking of Kings, le héros a un handicap mais l’histoire n’est pas là : c’est un récit initiatique avec un personnage atteint de surdité. C’est percutant et entraînant. Dans A Silent Voice, on parle de handicap et de harcèlement, mais c’est avant tout une romance entre deux adolescents. Le handicap est intégré à l’aventure.
Laurent Lejard, mai 2022.
Ranking of Kings, par Sosuke Toka, éditions Ki-oon, 7,65€ en librairies. Le second tome de Ranking of Kings sera publié par Ki-oon en juin. Ce manga a été adapté dans une très belle animation, dont Crunchyroll propose la version en japonais sous-titrée français. 23 numéros en accès libre !
Avec le soutien de la Fédération Française de l’Accessibilité