La FNATH, Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, s’engage depuis 1921 pour défendre et accompagner les personnes accidentées de la vie, pour faciliter leur accès aux droits dans le domaine des accidents du travail, maladies professionnelles mais aussi de toute maladie et handicap. Depuis plus d’un siècle, nous haussons le ton lorsque les droits des travailleurs sont menacés. Or c’est précisément ce qui est en train de se passer concernant la législation en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP). Nous ne comprenons et n’acceptons pas qu’en 2025 une victime d’accident de travail ou de maladie professionnelle ne soit toujours pas indemnisée comme les autres victimes ! Contrairement aux victimes d’accidents médicaux ou de la route qui bénéficient par exemple d’une indemnisation intégrale de leurs préjudices, les victimes d’AT/MP ne bénéficient que d’un régime forfaitaire loin de pallier les préjudices subis.

Comment peut-on accepter que deux victimes d’un accident similaire puissent bénéficier de prises en charge complètement différentes simplement parce que l’une a subi le préjudice sur son temps de travail et l’autre pas ? Et nous ne parlons pas ici d’une différence de quelques euros, il s’agit d’écarts atteignant parfois plusieurs centaines de milliers d’euros ! A la FNATH, nous constatons que nombre de ces victimes ne parviennent pas à se relever du fait d’indemnisations trop faibles, en particulier concernant l’aide humaine et le déficit fonctionnel permanent. Nous voyons la détresse de ces hommes et de ces femmes qui ne demandent que justice !

Le plus aberrant est que la justice elle-même leur a donné raison ! La Cour de cassation comme le Conseil d’État avant elle, ont opéré un revirement de jurisprudence en 2023. La Justice estime ainsi qu’en cas de faute inexcusable de l’employeur la réparation des préjudices doit être intégrale et non forfaitaire. Tous comme les juges, la FNATH estime qu’il n’y a aucune raison qu’un accidenté du travail soit discriminé par rapport à une autre victime. La législation devrait donc confirmer cette évolution juridique pour mettre fin à une discrimination qui aurait dû être abolie depuis longtemps !

Les syndicats patronaux et de salariés n’ont pourtant pas saisi cette opportunité historique. Depuis mars 2023 ils invitent le législateur à limiter très fortement l’évolution de la législation ! C’est désormais chose faite depuis l’adoption du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. Pour la FNATH, l’accord qui a été conclu entre les partenaires sociaux puis en partie transcrit dans la loi est une trahison des milliers de victimes d’AT-MP qui cherchent simplement à obtenir la reconnaissance dont ils ont besoin pour vivre avec les séquelles de leur accident ou de leur maladie. Qui pourrait prétendre que cette considération n’est pas juste ?

Mais ce qui inquiète le plus notre association est que l’article 90 du PLFSS 2025 qui vient d’être définitivement adopté par le Parlement enterre l’idée d’une réparation intégrale en cas d’AT/MP et réaffirme le principe d’une réparation uniquement forfaitaire des préjudices subis par les victimes. Ce texte ne prévoit que des semblants d’améliorations, insignifiantes du reste, pour masquer les coupes sombres prévues dans les droits des travailleurs. Il semble que le Gouvernement n’a pas pris conscience du niveau d’injustice dont il est ici question !

La FNATH avait pourtant moult fois dénoncé la dangerosité, pour les victimes d’AT/MP, du contenu de l’accord signé par les partenaires sociaux. Pourtant, si le ministre du travail Olivier Dussopt l’avait fait à l’automne 2023, la ministre actuelle ne s’est pas opposée à la transposition de ce texte abject dans le PLFSS 2025. Depuis deux ans, la FNATH avait pourtant multiplié les rendez-vous avec les associations, les organisations syndicales, les parlementaires et les cabinets ministériels successifs. Nous étions parvenus à convaincre une partie de nos interlocuteurs de la nécessité de bâtir un autre texte pour que les victimes d’AT-MP soient indemnisées dignement. Pourtant, malgré ces efforts, le Ministère a souhaité consacrer le fait qu’une victime d’AT/MP ne sera jamais considérée comme une véritable victime et ne mérite ainsi pas, même en cas de faute inexcusable de l’employeur (FIE), une réparation intégrale des préjudices qu’elle a subis.

Dans un tel contexte, nous trouvons indigne le conseil qui nous est donné par les pouvoirs publics de nous demander de nous concentrer désormais sur le travail de nouveaux barèmes qui ne seront qu’un pansement sur une jambe de bois ! La FNATH, par responsabilité et dans l’intérêt des victimes que nous représentons, mènera bien sûr ce travail mais la vigilance sera de mise. Nous avancerons, si cela nous est permis, avec les partenaires sociaux de manière prudente car il n’est pas question qu’in fine les arrêts de 2023 de la Cour de Cassation soient en ligne de mire, notamment la définition de la rente AT/MP et celle du déficit fonctionnel permanent.

Nous regrettons que le Gouvernement, sous la pression des partenaires sociaux, grave dans le marbre la situation de sous-victime des victimes d’AT-MP. La FNATH continuera, au travers des dossiers qu’elle défend devant les plus hautes instances, à défendre une réparation intégrale et salue les décisions régulières de la plus Haute Cour qui contribuent à l’évolution de ce contentieux juridique.

FNATH, février 2025.

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